Login

Céréales : l’AGPB veut une refonte des échanges commerciaux

Alors que la Russie est devenue beaucoup plus active sur la scène internationale, l'AGPB souhaite que la France et l’Union européenne réagissent sur la manière de mener leur politique à l’international et en particulier sur l’Afrique.

Selon l’association spécialisée des céréaliers de la FNSEA, la nouvelle donne « déséquilibre les marchés et menace la paix ». Dans ce contexte, « la France et l’Union européenne doivent réagir sur la manière de mener leur politique à l’international et en particulier sur l’Afrique », soutient Eric Thirouin, le président de l’AGPB.

Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.

« Nous appelons le gouvernement à refonder sa politique et son action vis-à-vis des pays africains », a lancé Eric Thirouin, président de l’AGPB (Association générale des producteurs de blé), lors de la conférence de rentrée le 21 septembre 2023 à Paris. « Une situation économique inquiétante alimentée et accentuée par les conséquences de la guerre en Ukraine, l’interventionnisme russe en Afrique et l’élargissement de l’alliance des BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud, NDLR) bouleversent les fondamentaux du marché et présagent d’une recomposition totale du commerce international », estime le syndicat.

« Nous ne sommes plus dans un marché libre et mondialisé comme nous avons connu depuis les années quatre-vingt-dix, avec des marchés à terme à Chicago et une OMC (Organisation mondiale du commerce, NDLR) sanctionnant les opérateurs ne respectant pas les règles, souligne Eric Thirouin. Mais l’OMC est en mort cérébrale, la mondialisation s’est fragmentée. » Le président de l’AGPB regrette que la Russie soit devenue beaucoup plus active sur la scène internationale et utilise le blé comme « arme de diplomatie massive », notamment en Afrique.

Blé russe bradé vers l’Afrique

La Russie devrait récolter 89,6 millions de tonnes pour la prochaine campagne( 2023-2024), ce qui serait la deuxième meilleure de son histoire. Sur la campagne de 2022-2023, le pays « a exporté pas moins de 48,1 millions de tonnes en se déjouant des marchés classiques pour asseoir son influence auprès des pays tiers, affirme le syndicat des céréaliers. Un blé bradé qui a remporté tous les premiers appels d’offres des pays tiers face à un blé français mécaniquement moins compétitif. »

Pour l’AGPB, cette situation « a pour corollaire de remettre en question la fonction des marchés internationaux, puisque la construction des prix commence à échapper à la réalité des fondamentaux du marché ». En un an, le cours du blé a ainsi chuté de 200 euros la tonne entre mai 2022 et mai 2023, pendant que les charges, notamment le coût des engrais, bondissaient.

Changement de paradigme

« Pour la première fois depuis 30 ans, nous assistons clairement à un changement de paradigme économique très profond qui va bien au-delà de la seule guerre en Ukraine. Les cartes économiques et géopolitiques sont rebattues », estime Eric Thirouin. Et d’insister : « La France et l’Union européenne doivent réagir sur la manière de mener leur politique à l’international et en particulier sur l’Afrique. »

L’Afrique a des besoins forts en céréales, ce sont nos plus proches voisins. « Nous exportons entre 4 et 6 millions de tonnes sur le Maroc, la Tunisie et l’Algérie », chiffre Philippe Heusele, secrétaire général de l’AGPB. Avec l’Égypte, il est question davantage d’opportunités, « mais elle est aujourd’hui directement dans le méridien russe », estime-t-il. Sur l’Afrique subsaharienne, l’Hexagone exporte entre 1,8 et 2 millions de tonnes.

Accords bilatéraux

« Pourquoi la France ne pourrait pas s’engager à faire des contrats et de la commercialisation avec ces pays, et derrière donner des assurances », imagine Eric Thirouin, pour qui « il y a des choses à construire pour s’adapter aux nouvelles règles du jeu ». « De même, nous sommes intéressés par des ventes de ces pays d’Afrique qui ont des vraies possibilités de ventes sur les engrais », poursuit-il.

Selon lui, « on peut trouver des accords avec ces pays mais jusqu’alors on n’avait pas l’habitude, on laissait faire. Est-ce qu’on continue de laisser faire alors que les autres ne le font pas ou on s’investit et on a un vrai engagement politique sur ces sujets-là ? Les opérateurs ne vont pas suffire dans ce marché qui est en train d’être partitionné entre d’un côté le méridien russe et l’Occident. Concrètement, il faut se mettre autour de la table et construire les trente années qui viennent. »

A découvrir également

Voir la version complète
Gérer mon consentement